samedi 12 mars 2016

Ain't no sunshine, Bill Withers, 1971


I know, I know, I know...


Ain't no sunshine, Bill Withers, 1971


 Lire en Français      Read in English


Bill Withers, encore un type qui aura marqué l'histoire du rock, de la soul plus précisément, et dont personne ne parle jamais.
Aujourd'hui on évoque Ain't no sunshine, pépite incroyable qui a fait le succès de Bill Withers au point de l'étouffer et de lui voler la vedette! Mais Bill Withers, c'est aussi Just the two of us (excusez du peu), Harlem…
C'est l'un des grands représentants du son de Memphis, sans doute parce qu'il est accompagné par les stars de la Stax (  Ain't..  Est produit par Booker T Jones (qui signe les arrangements) quand même, hein, et Donald "Duck" Dunn (revoyez les Blues Brothers), Stephen Stills sont aux instruments).

Etonnant tout de même ce morceau, un brin bancal si on tient à une structure bien carrée, propre et tout. Comme Bill Withers vient auditionner alors que son morceau n'est pas terminé (il a pas tout écrit les paroles), il fredonne "I know" pour faire office de deuxième couplet. 26 fois "I know". 26 fois, quand même. Du coup moi aussi je fais un peu du remplissage…
Tout petit déjà, Bill Withers voulait devenir artiste. Mais bon, il est pragmatique et prudent, il se fait donc embaucher dans une usine (qui fabrique des sièges pour les avions - en vlà un détail important). D'ailleurs, il ne quittera pas "tout de suite" son job. Prudent, on vous dit.
Objectivement Bill Withers représente un style qui n'est pas, comme ne disent pas particulièrement les britaniques, ma tasse de thé.

Mais il faut avouer qu'il émane de ce titre, Ain't no sunshine, une magie rare. Due au dépouillement? A l'apparente fragilité de l'ensemble? Au sentiment qu'il "manque quelque chose"? Ce n'est, on l'a vu, pas qu'un sentiment! Au fait qu'on sent bien qu'on est loin des trucs sur-produits et tellement peaufinés qu'ils en perdent toute sensibilité toute âme. Car "la musique est un cri qui vient de l'intérieur", hein. La science mathématique est ce que les hommes, voulant tout codifier, ont plaqué dessus comme pour montrer qu'ils sont supérieurs aux émotions que la musique procure, qu'on peut les expliquer.

Bien plus blues que ce que fera Bill Withers ensuite, avec cet échange entre la voix et le riff de guitare, trois accords qui semble répondre au chanteur un peu comme Lucile répond à BB King. Le morceau commence 'A capella", puis viennent progressivement la guitare, puis la basse/batterie, avant le break du second couplet "I Know.." ponctué par la seule batterie. Simple, efficace. Magique. On pense aux Funk Brothers de la Motown (Ecurie concurrente!!), à "I heard it through the grapevine" et au fabuleux documentaire où les musiciens expliquent comment le morceau est né, puis le jouent en live…
Ain't No Sunshine n'est pas seulement étonnant par sa structure et la litanie des "I know" qui l'ont rendu si célèbre:
 Morceau court (2 minutes à peine passées), il surprend aussi par sa fin… qui nous laisse sur la nôtre.